La chimiothérapie
A retenir
La chimiothérapie a pour but d’empêcher la multiplication des cellules cancéreuses. Elle est particulièrement active sur les tissus à renouvellement rapide comme le sont les cellules leucémiques, mais également sur certaines cellules de tissus sains, comme par exemple, les cellules de la moelle osseuse ou de la peau. Son mode d’action ne permet pas de distinguer les cellules saines des cellules tumorales, raison pour laquelle elle peut entrainer des effets secondaires, comme la perte de cheveux ou le recours à des transfusions de produits sanguins.
Les agents anticancéreux sont classés en fonction de leur mode d’action. Ils sont administrés le plus souvent en association au sein de « protocoles » de polychimiothérapie, de manière à combattre la cellule leucémique par différents mécanismes d’action, limiter les doses de chaque produit administré et ainsi en améliorer la tolérance et réduire les risques de résistance aux traitements. Ils sont souvent administrés en cycles thérapeutiques ou cures de quelques jours, répétés à différents rythmes selon le protocole utilisé. Les périodes sans traitement permettent aux cellules normales de la moelle osseuse et des autres tissus de récupérer.
Les effets secondaires de la chimiothérapie sont bien connus. La plupart des effets indésirables sont rapidement réversibles, comme l’aplasie médullaire, ou la perte des cheveux. Certains effets indésirables sont proportionnels à la dose cumulée du médicament utilisé, ce qui conduira l’oncologue à surveiller régulièrement certains organes, comme le cœur par exemple, avec les antracyclines, afin d’éviter la survenue de séquelles irréversibles.
L’objectif de la chimiothérapie est d’obtenir la rémission de la maladie, c’est-à-dire la disparition des signes de la maladie, ou à défaut d’y parvenir, d’en ralentir son évolution.
Son principe
La chimiothérapie repose sur l’activité de molécules cytotoxiques qui interagissent avec les structures essentielles de la division et de la survie cellulaires. Elle agit surtout sur les cellules à multiplication très rapides, comme le sont les cellules leucémiques, mais également sur des cellules saines non malades (de la moelle osseuse, de la peau, du tube digestif … ).
Les agents anticancéreux sont classés en fonction de leur mode d’action (11). Les principales classes thérapeutiques utilisées en hématologie sont les suivantes (12):
- Les alkylants
- Les agents intercalants
- Les antimétabolites
- Les poisons du fuseau
Ils peuvent être administrés par voie veineuse, voie sous-cutanée ou parfois par voie orale. Les agents anticancéreux utilisés en hématologie sont souvent administrés en association, dans le cadre de protocole de traitement de polychimiothérapie (11). Ils sont souvent administrés en cycles thérapeutiques ou cures de quelques jours, répétés à un certain rythme, pour permettre aux cellules normales, en particulier aux cellules de la moelle osseuse et du tube digestif, de récupérer des effets indésirables transitoires (13).
L’objectif est d’obtenir une rémission complète de la maladie (absence de signes cliniques ou biologiques de la maladie), condition indispensable et nécessaire, pour permettre une guérison. La guérison est souvent arbitrairement définie, comme l’absence de récidive à distance du traitement et après 5 ans de la rémission complète.
Les protocoles de chimiothérapie diffèrent d’une pathologie à l’autre, et au sein d’une même pathologie (11)
Ses effets secondaires
Ils sont liés à sa toxicité sur les cellules saines. Il faut distinguer les effets secondaires immédiats et les effets secondaires tardifs.
Effets secondaires immédiats
Ils surviennent rapidement après l’administration de la chimiothérapie. Ils sont observés avec la majorité des anticancéreux. Ils sont généralement réversibles et leur intensité dépend de la dose et des modalités d’administration de chaque produit (11). Ils sont de différente nature :
· Hématologique :
- Ils surviennent 7 à 10 jours après l’administration de la chimiothérapie sous la forme d’une neutropénie (baisse des polynucléaires neutrophiles) mais toutes les autres lignées peuvent être touchées, on parle alors d’aplasie. En cas de fièvre, elle nécessite l’administration d’antibiotiques. La neutropénie peut parfois être limitée dans le temps parfois grâce à l’utilisation de facteur de croissance hématopoïétique (G-CSF). Le recours à la transfusion de plaquettes et de globules rouges pendant cette période est souvent nécessaire.
· Digestive :
- Il s’agit de nausées et de vomissements aigus ou retardés nécessitant le recours à un traitement anti-nauséeux ou anti-émétique (neuroleptiques, corticostéroïdes, sétrons).
- Il existe souvent une atteinte des muqueuses, notamment buccale avec parfois présence d’aphtes multiples et très douloureux (mucites buccales chimio-induites). Les mucites nécessitent l’utilisation de bains de bouche désinfectant et l’emploi de traitement anti-douleur, comme la morphine. Il peut exister des douleurs abdominales et une diarrhée.
- Une constipation pouvant aller jusqu’à l’occlusion aiguë peut se voir avec certaines chimiothérapies.
· Neurologique :
- Ils se manifestent sous la forme de polynévrites avec troubles de la sensibilité et plus rarement diminution de la force musculaire par effet cumulatif et beaucoup plus rarement sous la forme de crises convulsives.
· Vésico-rénale
- Certains traitements peuvent être responsables de cystite hémorragique. Un traitement préventif par l’uromitexan contre l'urotoxicité des oxazaphosphorines ( cyclophosphamie / ifosfamid) réduit considérablement l’incidence de cette complication. La toxicité rénale est essentiellement le fait du méthotrexate qui est éliminé par le rein et tend à précipiter en milieu urinaire acide (d’où l’utilisation de bicarbonates pour alcaliniser les urines et d’acide folinique, antidote du méthotrexate).
· Cutanée
- Une alopécie (chute des cheveux), apparaissant dans les 20 jours après le début du traitement et toujours réversible, représente un obstacle psychologique important; elle est fréquente mais dépend du type de traitement utilisé. La perte des cheveux est parfois plus lente ou incomplète chez certains individus, mais elle ne signifie pas que le traitement est inefficace. On peut également observer des modifications de la structure des ongles. Des anomalies de la coloration de la peau par toxicité directe cutanée ou complication allergique peuvent survenir.
· Baisse du système immunitaire (immunodépression) :
- C’est un effet indésirable fréquent, quasi-constant, secondaire à la chimiothérapie mais aussi à un défaut de l’immunité qui est défaillante dans les hémopathies malignes. De ce fait, toutes les complications infectieuses peuvent se rencontrer. L’immunodépression persiste plusieurs mois après l’arrêt du traitement. Elle peut persister durablement après une allogreffe de moelle osseuse.
. Signes généraux
- La fatigue est fréquente après une chimiothérapie. Elle s’estompe progressivement à distance de l’administration du traitement. Certains médicaments peuvent entrainer des troubles de l’humeur, avec de la tristesse, de l’irritabilité, de la colère, et parfois un syndrome dépressif. Il faut en parler au médecin. Lorsqu’il existe une atteinte du tube digestif ou des nausées importantes, la chimiothérapie est responsable d’une perte de l’appétit (anorexie) ou d’une impossibilité de s’alimenter (mucite). Une prise en charge nutritionnelle spécifique est alors nécessaire (nutrition par une sonde gastrique, ou nutrition par voie intraveineuse). Les douleurs sont fréquentes et transitoires au cours des traitements. Elles doivent être signalées pour qu’un traitement spécifique soit mis en route. Il ne faut pas craindre les traitements anti-douleurs, notamment la morphine, qui est très efficace et permet la poursuite du traitement dans de bonnes conditions.
Effets secondaires tardifs
Les effets secondaires tardifs apparaissent après un temps d’exposition plus long à la chimiothérapie et sont souvent irréversibles (11). Ils peuvent toucher différents organes ou systèmes.
· La moelle osseuse:
- Certaines chimiothérapies exposent à un risque de myélodysplasies secondaires, qui évoluent fréquemment en leucémies aigues. Ce risque est connu et pris en compte dans la balance bénéfice-risque du cancer sous-jacent qui est traité. Ces complications surviennent le plus souvent 3 à 5 ans après le traitement. Elles sont graves et leur traitement est difficile.
· Le cœur :
- Le risque de complications cardiaques avec les anthracyclines est bien connu. Il se traduit par une insuffisance cardiaque gauche insidieuse et souvent rebelle au traitement. Cette toxicité est dite «cumulative ». Elle justifie la surveillance attentive de la fonction cardiaque par une échographie cardiaque régulière et est rare si la dose maximale tolérable (DMT) n’est pas dépassée.
· Les poumons :
- Une insuffisance respiratoire par fibrose pulmonaire peut être le fait d’un traitement par bléomycine ou busulfan.
· Le foie :
- Des hépatites chroniques évoluant vers une cirrhose ou une maladie occlusive des veines du foie peuvent se rencontrer après une chimiothérapie à dose élevée, notamment au décours de greffe de cellules souches hématopoïétiques. Ces complications peuvent mettre en jeu le pronostic vital.
· La fertilité :
- Certains agents anti-cancéreux, en particulier les alkylants, ont une toxicité sur les tissus de la reproduction. Cette toxicité est corrélée à la dose cumulée reçue et peut être définitive. Chez l’homme ou la femme jeune, une congélation du sperme ou une congélation d’ovocytes sera proposée dans cette situation, avant l’administration du traitement à risque, si l’état clinique du patient le permet.